Droit des contrats - La réaffirmation de l’arrêt Myr’ho - la garantie effective de la réparation du dommage par l’Assemblée Plénière de la Cour de cassation

Aux termes d’un arrêt du 13 janvier 2020 n°17-19.963, l’Assemblée Plénière de la Cour de cassation a rappelé l’attendu débattu de l’arrêt Myr’ho du 6 octobre 2006 : « le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage ».

Par principe, conformément à l’article 1165 du Code civil, les conventions n’ont d’effet qu’entre les parties contractantes.

Ainsi, un contrat ne produit d’effets qu’à l’égard des parties qui en sont signataires.

Par conséquent, le tiers à un contrat ne peut, en principe, être victime d’un contrat, puisque celui-ci ne le concerne apparemment pas.

Pourtant, il serait imprudent de s’en tenir à cette prétention, sans plus de précautions.

En effet, dans une économie de plus en plus sectorisée, les acteurs se partagent souvent les missions au sein d’une même opération. Le comportement fautif de l’un peut avoir des conséquences sur les autres.

Or, comme l’affirme la Cour de cassation, « les contrats, opposables aux tiers, ne peuvent, cependant, leur nuire ».

Alors, comment garantir à un tiers, victime d’une inexécution contractuelle, l’indemnisation du préjudice qu’il subit ?

Depuis 2006, la Cour de cassation apporte une solution claire : le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage.

Si certains y voient une entorse au principe d’effet relatif des conventions rappelé à l’article 1165 du Code civil, la règle posée permet toutefois la garantie effective d’une indemnisation en cas de dommage subi.

C’est cette deuxième idée que défend la Cour de cassation. La Cour précise donc logiquement qu’il « importe de ne pas entraver l’indemnisation de ce dommage. » et que « le principe ainsi énoncé était destiné à faciliter l’indemnisation du tiers à un contrat ».

Alors, puisque les contrats ne peuvent nuire aux tiers, et qu’il convient de garantir à ces derniers une indemnisation en cas de dommage subi, la Cour de cassation juge que : « le manquement par un contractant à une obligation contractuelle est de nature à constituer un fait illicite à l’égard d’un tiers au contrat lorsqu’il lui cause un dommage ».

Autrement dit, la seule violation du contrat suffit à caractériser le fait générateur de leur action en responsabilité.

C’est la raison pour laquelle le tiers « n’est pas tenu de démontrer une faute délictuelle ou quasi délictuelle distincte de ce manquement. »

La Cour de cassation simplifie donc le régime de l’action en responsabilité délictuelle intentée par un tiers au contrat, victime de l’inexécution de celui-ci. Celui-ci pourra se contenter de rapporter (i) l’inexécution du contrat ; (ii) l’existence de son préjudice ; (iii) un lien de causalité entre les deux.

Me Emmanuel Boukris intervient en droit civil, droit des contrats et droit des affaires.

 

 

Emmanuel Boukris