Droit des affaires | Rupture de relations commerciales établies et non respect du préavis, l'indemnisation se fait sur la base de la marge brute et non du chiffre d'affaires

La chambre commerciale de la Cour de cassation a rendu un arrêt, en date du 28 juin 2023, dans lequel elle indique que le préjudice subi par une société en raison de la rupture brutale de ses relations commerciales s’évalue en considération de la marge brute escomptée et non de l’équivalent du chiffre d’affaires qui aurait pu être réalisé. La marge brute escomptée s’entend comme la différence entre le chiffre d'affaires hors taxe escompté et les coûts variables hors taxe non supportés durant la période d'insuffisance de préavis.

" 10. Il résulte de l’article L. 442-6, I, 5° du code de commerce que le préjudice principal résultant du caractère brutal de la rupture s’évalue en considération de la marge brute escomptée, c’est-à-dire la différence entre le chiffre d’affaires hors taxe escompté et les coûts variables hors taxe non supportés durant la période d’insuffisance de préavis, différence dont pourra encore être déduite, le cas échéant, la part des coûts fixes non supportés du fait de la baisse d’activité résultant de la rupture, durant la même période.

11. Après avoir retenu, d’une part, que le syndicat avait brutalement rompu la relation commerciale qu’il entretenait avec la société Securitas depuis deux ans et demi, d’autre part, qu’au regard de cette durée, le préavis aurait dû être de quatre mois, l’arrêt en déduit à bon droit que l’assiette de l’indemnisation de la rupture brutale de cette relation commerciale ne pouvait comprendre l’équivalent du chiffre d’affaires qui aurait été réalisé pendant ces quatre mois, comme le prétend la société Securitas, mais celui de la marge brute, qu’il a évaluée au regard des éléments du dossier.”

[…]

“Vu l’article 1149, devenu 1231-2, du code civil :

En application de ce texte, les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé.

17. Pour fixer le montant des dommages et intérêts au paiement duquel le syndicat est condamné, pour le non-respect du délai de préavis contractuel, l’arrêt, après avoir relevé que la société Securitas a produit des factures des prestations qu’elle a réalisées pour le syndicat durant les trois mois qui ont précédé la rupture des relations contractuelles, retient qu’il doit lui être alloué, en réparation du préjudice subi, la somme correspondant au chiffre d’affaires qu’elle aurait perçu si elle n’avait pas été privée de deux mois de préavis.

18. En statuant ainsi, alors que le préjudice subi par la société Securitas en raison du non-respect du préavis contractuel consiste en la perte de la marge brute escomptée, dans les conditions précisées au paragraphe 10, la cour d’appel a violé le texte susvisé.” - Cass. com., 28 juin 2023, n° 21-16.940, Publié au bulletin.

Emmanuel Boukris